Nouvelles de RTOERO Équité et inclusion

5 choses que j’ai apprises sur l’identité bispirituelle

Article rédigé (en anglais) par Shaneeka Forrester pour RTOERO pour souligner le Mois de la fierté 2025. Shaneeka Forrester est une artiste, mère et militante crie de la Première Nation de Brunswick House, ayant des racines dans le comté de Simcoe en Ontario.


Au cours des années, j’ai pris le temps de réfléchir, d’écouter et d’apprendre des communautés qui m’entourent afin de mieux comprendre ce que signifie la bispiritualité (two-spirit en anglais). Quand j’ignore quelque chose, j’aime redevenir une étudiante curieuse afin d’en apprendre le plus possible. Souvent, cela signifie écouter les histoires des autres et agir en tant qu’allié. L’approche du mois de juin est la période idéale pour partager certaines choses que j’ai apprises sur les « 2S » contenus dans l’acronyme LGBTQIA2S+.

Bispiritualité : un terme ancré dans l’identité et la conscience

Le terme anglais « two spirits » (bispiritualité) est apparu en 1990, à la suite d’une conférence qui s’est tenue à Winnipeg. Ce terme n’est pas seulement une étiquette : il sert aussi à sensibiliser les communautés autochtones et il est souvent considéré comme étant un troisième genre. Depuis sa création, ce terme a fait l’objet d’un examen minutieux, mais a suscité l’intérêt des autochtones qui s’identifient à sa signification. La bispiritualité réfère aux personnes s’identifiant comme ayant un esprit masculin et un esprit féminin; le terme « bispirituel » est utilisé par certaines personnes autochtones pour décrire leur identité sexuelle, spirituelle et de genre. C’est une terminologie à laquelle les personnes n’appartenant pas aux communautés autochtones peuvent se référer, mais elle est utilisée exclusivement par les personnes d’ascendance autochtone.

Honoré et respecté : le rôle vénéré des personnes bispirituelles

En remontant dans le temps, on pourrait observer des personnes bispirituelles respectées dans les sociétés autochtones. Leur capacité unique à comprendre le masculin et le féminin leur a souvent permis d’occuper des rôles de premier plan dans leurs communautés. Il est important de reconnaître que les communautés autochtones utilisent aussi des expressions et des mots traditionnels pour désigner ces personnes. Ces appellations ont une signification profonde, car ils sont ancrés dans l’histoire culturelle et incarnent des connaissances et des enseignements transmis de génération en génération. Lors de la visite d’une communauté, mieux vaut toujours demander avec bienveillance quel terme décrit le mieux les membres de la communauté dont le genre est non binaire.

Faire face à l’adversité : les défis actuels des personnes bispirituelles

En référence à la population bispirituelle, nous devons aussi reconnaître les nombreux défis auxquels elle est actuellement confrontée. La discrimination reste omniprésente, les personnes bispirituelles étant plus exposées aux agressions, aux homicides et aux suicides que les personnes qui ne sont pas bispirituelles. En plus de ces obstacles, elles font face à des embûches particulières qui façonnent leur expérience du monde.

Évoluer dans la tradition : le parcours pour réapprendre des pratiques culturelles

Avoir à réapprendre les traditions et les pratiques culturelles constitue un défi unique au sein de la communauté bispirituelle. Même si certaines communautés autochtones abordent leurs systèmes de croyances de manière non binaire, beaucoup d’entre elles conservent des enseignements spécifiques à certains genres. Ces enseignements peuvent aller de simples directives, comme la tenue à porter lors d’une cérémonie, à des rôles plus complexes qui définissent la place et les responsabilités de chacun au sein de la communauté. Pour les personnes dont l’identité de genre diffère de celle attribuée à la naissance, ce parcours implique souvent d’adopter d’un nouvel ensemble de protocoles pour les cérémonies. Lorsqu’une personne réapprend les protocoles appropriés, elle peut se sentir exclue de sa communauté, sans que ce soit sa faute.

Au-delà de la binarité : élargir les perspectives sur le genre et la sexualité

Les personnes qui s’identifient comme bispirituelles peuvent utiliser ce terme pour décrire leur genre, tandis que leur orientation sexuelle peut être hétérosexuelle, asexuelle, bisexuelle, gaie, lesbienne ou queer. Elles peuvent aussi adopter la terminologie de leur identité sexuelle, tandis que leur genre s’aligne sur les identités cis, trans ou intersexes. Même si cela peut sembler complexe sous l’angle des idéologies occidentales, il est important de reconnaître que les perspectives autochtones sur le genre et la sexualité découlent de systèmes de croyances bien plus anciens que les constructions coloniales. Les personnes bispirituelles sont en mesure d’exister au-delà des conceptions eurocentriques du genre et peuvent assumer de nombreux rôles traditionnellement réservés à un seul sexe. Les influences occidentales ont cependant joué un rôle dans la façon dont certaines communautés autochtones interprètent ces termes aujourd’hui.

Pour les individus n’appartenant pas à des communautés autochtones, il n’est pas facile de saisir pleinement le sens de la bispiritualité. Les concepts de genre et d’identité sexuelle dans les cultures autochtones vont au-delà des définitions binaires et offrent des perspectives qui remettent en question les normes occidentales. Mais avec une ouverture de cœur et d’esprit, nous pouvons écouter les témoignages des personnes bispirituelles et honorer la richesse de leur vision du monde.